samedi 7 novembre 2009

Pas de retour - Chapitre I - Première partie

En sueur et essoufflé, Arthur n’en avait pas moins le sourire.

Un sourire franc et lumineux, qui ne manquait jamais d’étonner. Si Patrick Brun le connaissait bien, ce sourire, jamais il ne s’en lassait. « Décidément - pensait-il en regardant son élève - ce gosse a tout pour lui : talentueux, intelligent, gentil comme tout, beau gosse et jamais la grosse tête. Comme j’aimerais qu’ils soient tous comme lui… »

Patrick Brun était instructeur de Taekwondo depuis une quinzaine d’années, déjà. Il avait la chance d’exercer son métier par passion et non pas, uniquement, pour recevoir son cheque en fin de mois. A l’âge de 20 ans, désœuvré comme la plupart des ses acolytes de la cité, il a découvert le Taekwondo par pur hasard, dans un minuscule Dojang (nom donné aux centres d’entraînement dédiés) de sa ville, Bagnolet. Le maître des lieux était un coréen, ne payant pas de mine, sachant au plus 10 mots de français mais qui excellait pour communiquer la technique et la philosophie de cet Art Martial. Dès sa première session, Patrick sut que le Taekwondo ferait partie intégrante de sa vie, comme la drogue, l’alcool ou la violence gratuite formait le lot quotidien d’une grande majorité des jeunes de son âge. Il avait trouvé sa voie et avait investi sa vie dans la pratique de cet art qui commençait a peine à se développer, à l’époque. Il participait aux tournois organisés en France et en Europe et gagnait très souvent. Il a même eu l’occasion de séjourner en Corée du Sud pendant un mois et se mesurer aux champions du coin. Il avait été loin d’être ridicule et son Maître - qui l’avait accompagné pour le voyage - même s’il ne disait rien, était fier de son disciple et du fait d’avoir reçu les félicitations des grands pontes de la WTF (Fédération mondiale de Taekwondo, basée a Séoul) pour le travail accompli hors des frontières. A 25 ans, Patrick Brun a décidé d’arrêter la compétition pour se consacrer à l’instruction. Il avait repris le Dojang de son Maître - reparti dans son pays - et l’avait développé, avec le succès grandissant du Taekwondo en Occident.

Avec son Club, Patrick avait éduqué des centaines d’enfants, leur évitant ainsi de tomber dans les dérives trop facilement offertes par les cites ouvrières, et sorti certains d’entre eux pour son département « Elites », dédié spécifiquement à la compétition. Le nombre de médailles gagnées dans les différentes catégories de jeunes l’ont définitivement aidé à recruter de plus en plus d’élèves. A 40 ans, il vivait plutôt bien de son activité et pouvait dédier 80% de son temps au suivi des « élites », laissant la formation de base aux mains expertes de ses différents instructeurs.

Arthur était la vedette de ce groupe d’élites, composé d’une vingtaine de pratiquants de haut niveau, âgés de 10 à 20 ans. Il pratiquait depuis l’âge de 5 ans, poussé par ses parents qui croyaient dans les vertus des arts martiaux. Très tôt, Arthur avait montré des dispositions physiques exceptionnelles pour le Taekwondo : souplesse, puissance, rapidité et coordination. A cela s’ajoutait un mental très fort, malgré son très jeune âge. Fait exceptionnel, il n’avait jamais perdu un tournoi auquel il avait participé, aussi bien en France que dans les autres pays d’Europe. Depuis l’âge de 10 ans, il avait récolté 50 médailles d’or !